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lundi 3 septembre 2012

L'eutrophisation: Une mort annoncée (partie 1)



Depuis quelques années, la nécessité de protéger nos cours d'eau est particulièrement d'actualité. La qualité de l'eau étant de moins en moins satisfaisante, particulièrement en milieu urbain, mais surtout la « fameuse » crise des cyanobactéries, aussi appelées algues bleu vert, a contribué à cette prise de conscience. Depuis, il est devenu évident que des mesures devaient mises en place afin de préserver nos lacs et rivières. L’une de ces mesures est justement la renaturalisation des berges. En effet, comme c’est le cas au GLSF, dans plusieurs municipalités du Québec, de nouveaux règlements ont fait leur apparition afin de mieux encadrer la protection des berges. Malgré les efforts mis en place, ces nouvelles réglementations ont causé beaucoup de remous dans la vie des propriétaires riverains. En effet, plusieurs ont dû ou devront procéder à des travaux importants afin de se conformer aux nouvelles normes. Pour bien des gens, ces modifications à l’aménagement de leur terrain sont tombées un peu comme une fatalité. Au risque de devoir payer des amendes parfois salées, plusieurs se sont conformés par obligation sans vraiment comprendre la réelle utilité d’un tel aménagement. 

Au cours des prochaines semaines, une série de blogues sera publiée afin, je l’espère, de vous permettre de mieux comprendre toute l’importance de cette petite bande de terrain. Le premier blogue, celui de cette semaine, portera sur le phénomène de l’eutrophisation. 

1. L'eutrophisation, oui, mais c'est quoi au juste?
Depuis quelques années, nous entendons beaucoup parler du phénomène de l'eutrophisation des lacs. Mais qu'est-ce que l'eutrophisation au juste?

L'eutrophisation, qui est causée par l’enrichissement de l’eau en phosphore, en azote et autres matières nutritives, c'est simplement le processus de « vieillissement » d’un lac. Ce qui est important de comprendre, c'est que comme nous, les lacs suivent un cycle préétabli de vieillissement qui s'opère de leur formation jusqu'à leur disparition. Chacune des étapes de la vie du lac, que l'on nomme niveaux trophiques, correspond à des caractéristiques biotiques (ce qui est vivant) et abiotiques (ce qui est inanimé) précises. Voyons maintenant, plus en détail, les différentes étapes du cycle de vie d'un lac. 

1.1 Le cycle de vie d’un lac1-2-5-6 :

Le cycle de vie d’un lac est extrêmement long. En effet, la durée de vie d’un lac varie entre quelques dizaines à environ une centaine de milliers d’années1. Si ces chiffres peuvent nous sembler immenses, à l’échelle géologique, des milliers d’années ce n’est pas grand-chose. Pensez simplement au fait que la Terre a 4,55 milliards d’années et que les espèces de cyanobactéries que nous connaissons aujourd'hui étaient déjà présentes il y a plus de 2 milliards d’années (2).

La formation d’un lac

Plusieurs évènements, que l’on classe en trois catégories, peuvent mener à la formation d'un lac. La première catégorie est celle des évènements catastrophiques comme le mouvement des glaciers, la chute d’un météorite, le mouvement des plaques tectoniques, les éruptions volcaniques, etc. Dans tous les cas, un lac se formera quand l’évènement crée une dépression dans le sol et que cette dépression se remplit, par la suite, d’eau. Au sud du Québec, mais aussi dans le monde, la majorité des lacs sont d’origine glaciaire(3). Dans la région, le lac Memphrémagog, tout comme le lac Mégantic, est d’origine glaciaire.

La deuxième catégorie concerne les évènements dits 'lents' : un lac se forme suite à un lent processus d'érosion et de déposition qui mène ultimement à l'isolement d'une section d'un cours d'eau préexistant (bras mort de rivière par exemple)(3).

Finalement, dans certains cas, c'est l'action de l'homme qui est à l'origine de la naissance d'un lac. Dans le cas du GLSF, c'est la construction du barrage Jules-Allard, en 1917, qui est à l'origine du lac tel que nous le connaissons aujourd'hui(4). En effet, ce barrage a causé une élévation de niveau d'eau de près de 25 pieds (8 m).

Le premier niveau trophique : Le lac Oligotrophe

De manière générale, le lac oligotrophe est riche en oxygène dissout et pauvre en nutriment. La productivité primaire est donc faible. Par productivité primaire, on entend le rythme auquel les algues (phytoplancton, algues et autres végétaux aquatiques) prolifèrent. L'eau est claire et il y a peu ou pas de matière en suspension dans l'eau (turbidité faible). Les poissons comme la truite et le corégone sont présents en abondance. Il y a plusieurs espèces de plantes, d'algues, de poissons, de crustacés, d'insectes... mais ils sont présents en nombre relativement faible. C'est pourquoi on dit que la biodiversité est élevée (plusieurs espèces), mais que la biomasse (peu d'individus) est faible.



Source : http://www.banderiveraine.com/index.php?id=7
Le lac Oligotrophe: Le lac peu nourri
Ex. Lac Beauport7 (2003)
  Eau claire
-    Lac très bien oxygéne
-    Productivité primaire faible
-    Peu de végétation aquatique
-    Lac profond

Le deuxième niveau trophique : Le lac mésotrophe 

Lentement, le ruissellement de l'eau sur les terres, l'érosion des rives et l'apport en sédiments par les affluents (cours d’eau qui se jettent dans le lac) augmentent la concentration en nutriments du lac. Cet apport nutritif cause une augmentation de la productivité primaire. Les algues et les plantes aquatiques prolifèrent. Il en est de même pour les poissons, crustacés et invertébrés. L'eau devient plus turbide à cause de la matière organique en suspension. Cette matière organique coule éventuellement au fond du lac où elle est décomposée. Les organismes décomposeurs utilisent une grande quantité d’oxygène pour faire leur travail, la concentration en d'oxygène dans l'eau diminue donc. Ce lac est mésotrophe. 



Source : http://www.banderiveraine.com/index.php?id=7
Le lac Mésotrophe: Le lac en changement
Ex. Grand lac Saint-François8 (1976). En 2001, il était considéré  comme mésotrophe avancé et les données préléminaire de la dernière études sur le lac ne semble pas indiquer d'améliorations.
-   Eau colorée
-   Lac bien oxygéné
-   Productivité primaire moyenne
-   Augmentation du couvert de végétation aquatique
-   Accumulation de sédiments dans le fond du lac

Le dernier niveau trophique : Le lac eutrophe 

Les processus décrits plus haut se poursuivent : Les sédiments commencent à s'accumuler au fond du lac : le lac est donc de moins en moins profond et donc de plus en plus chaud. La productivité primaire explose et le littoral se couvre d'algues et de végétaux aquatiques. La concentration en nutriments et la turbidité de l’eau sont très élevées. L'activité de décomposition est très forte, ce qui peut occasionner des périodes dites anoxiques où la concentration en oxygène dissout descend momentanément au-delà des limites de tolérance des organismes qui y vivent. La biodiversité est faible et diminue continuellement. Les truites, les perchaudes et les dorés sont lentement remplacés par des espèces tolérantes aux faibles concentrations en oxygène dissout comme les carpes. La qualité de l’eau est mauvaise ce qui complique le travail des usines de filtration de l’eau potable. Les épisodes de fleur d’eau ou de bloom de cyanobactéries sont fréquents. Le lac est dit eutrophe.



Sourcee : http://www.banderiveraine.com/index.php?id=70


Le lac Eutrophe: Le lac bien nourri
Ex. Baie Missisquoi9 (1993). Depuis de début des années 2000, la baie Missisquoi est eutrophe avancée.
-   Eau très colorée et turbide
-   Lac peu oxygéné
-   Productivité primaire élevée
-   Couvert de végétation aquatique très développés
-   Forte accumulation de sédiments dans le fond du lac: le lac est peu profond et donc plus chaud
-   Faible biodiversité
-   Eau de mauvaise qualité

La fin de vie d'un lac 

Lentement mais sûrement, le lac va se remplir de sédiments, les algues, puis les végétaux vont couvrir la totalité de la superficie du lac. Le lac va devenir un marécage, un marais ou une tourbière et va se transformer en une jeune forêt. Ce processus, de manière naturelle, se déroule sur des dizaines voir des centaines de milliers d'années. Cependant, depuis un moment, une nouvelle variable est venue changer la donne.


En effet, depuis les dernières décennies, on observe un vieillissement particulièrement rapide de nos lacs. Le passage d’un niveau trophique à l’autre ne se fait plus en dizaines de milliers d’années, mais plutôt en quelques dizaines d’années seulement. Que se passe-t-il donc? Pour en apprendre davantage, je vous invite à consulter à nouveau le blogue la semaine prochaine afin de découvrir une partie de la cause du « vieillissement prématuré » de nos lacs.



Bibliographie
1.      Hade, A. (2002), Nos lacs, les connaitre pour mieux les protéger. Bibliothèque nationale du Québec, Édition Fides, Canada, 359 pp.
2.      Smith, G. A., Pun, A. (2006). How does earth work? Physical geology and the process of science. Pearson Education, États-Unis, 641 pp.
3.      Anctil, F., (2008). L’eau et ses enjeux. Les presses de l’université Laval, Canada, 228 pp.
4.      Site de l’Office de tourisme de la MRC des Appalaches consulté en août 2012,  disponible au : http://www.tourismeregionthetford.com/vacances-quebec/Attraits-et-activites/Activites-ete/grand-lac-st-francois.aspx)
5.      Site du RAPPEL consulté en août 2012, disponible au : http://www.rappel.qc.ca/lac/eutrophisation.html
6.      Site du MDDEP, onglet Eau, consulté en août 2012, disponible au : http://www.mddep.gouv.qc.ca/eau/inter.htm
7.      Simoneau, M., L. Roy. Et M. Ouellet, 2004. Info-Lacs – Résultats de l’année 2003, Québec, ministère de l’environnement, Direction du suivi de l’état de l’environnement, envirodoq n° ENV/2004/0374, rapport n° QE/152, 14 p.
8.      Major, L., P. Pettigrew et P-Y. Collin. 2001. Caractérisation ichtyologique du lac St-François et état de la population de dorés jaunes Stizostedion vitreum), 1998-2000. Société de la faune et des parcs du Québec. Direction de l.aménagement de la faune de la Chaudière-Appalaches. 28p.+ ann.
9.      D’Auteuil, C., 2011. Le diagnostic du bassin versant de la baie Missisquoi, Organisme de bassin versant de la baie Missisquoi. 200 pp. 

 

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